I. Une fracture entre deux mondes agricoles. L'étalement de pays en latitude (5°14'N / 33°40'S) et en longitude, des contreforts andins (73°52'O), à l'océan Atlantique (34°48'O) permet d'y cultiver aussi bien les plantes tropicales que celles du monde tempéré et les conditions du milieu naturel, principalement climatiques, sont parmi les principaux déterminants de ses spécialisations : le poivre, la mauve, le jute et le palmier à huile apprécient le climat chaud et humide de l'Amazonie ; les climats subtropicaux de São Paulo et du Sud leur permettent de jouer à la fois sur les denrées tropicales (canne à sucre, café, arachide) et sur les grains (maïs, soja), les fruits et les légumes de climats tempérés (pomme de terre, blé, avoine, raisin, pommes). 2. 1er exportateur mondial de soja, de viande bovine et de volailles A cette occasion, Terre-net vous propose un focus sur l'agriculture de ce pays à travers plusieurs articles : 6e puissance économique mondiale mais avec une agriculture duale. Cette moyenne a de surcroît peu de sens car elle recouvre des situations très différentes : en dehors du littoral nordestin et des régions d'agriculture intensive du Sud-Sudeste le taux d'anthropisation [4] n'atteint nulle part 12% du territoire de chaque commune et il tombe en dessous de 1,5% dans toute l'Amazonie. Le partage des tâches et des cultures entre paysannerie et agrobusiness joue à plein, la première fournissant l'essentiel de l'alimentation du pays, le second des produits d'exportation, et des "spécialités" régionales apparaissent nettement. Les paysans installés dans cette zone de réforme agraire ont créé une coopétarive pour commercialiser leur production (en briques de lait UHT), qui affiche clairement (et fièrement) qu'il s'agit de "produits de la réforme agraire". Il n'en est que plus remarquable que, même avec ces chiffres très inférieurs à ceux de la Pesquisa pecuária municipal, le recensement révèle bien l'ampleur de cette croissance de l'élevage dans le nord du pays. Depuis le début des années 90, la production agricole a plus que doublé et la production animale, elle, a triplé. Vision idéalisée, la stupa boudhiste censée évoquer l'Inde et l'accompagnant en turban, ainsi que la localisation bucolique du quai de débarquement, ont peu à voir avec la réalité de l'événement, Source du texte ci-contre : Mathias et Mundy (2005). Pointeur .kmz sur l'image Google Earth d'Eldorado de Carajás (6° 6'7.66"S /49°21'13.55"O), Cliché : Hervé Théry, Eldorado de Carajás (Pará), 2007. De ces contrastes et de leurs combinaisons ressort une opposition marquée entre des systèmes économiques et régionaux très différents, dont les performances économiques et sociales sont on ne peut plus inégales. Théry H. - "La vague déferlante du soja brésilien", Perspectives agricoles de l'Ocde et de la FAO, 2008 - 2017, Le Mouvement des travailleurs sans terre (. S'il est déjà un grand pays agricole, le Brésil est aussi – encore – un pays pionnier, son agriculture est en mutation constante, elle conquiert constamment des terres nouvelles, déplace ses frontières et ses spécialisations locales et régionales, dans un mouvement continu d'expansion pionnière et de réorganisation constante des régions déjà conquises. C'est en particulier le cas dans le Nordeste, où cohabitent terres en friches et paysans occupant des terres sans titre de propriété, d'où la vigueur des conflits dans cette région et l'émigration des Nordestins vers l'Amazonie orientale. L'élevage mérite une attention particulière en raison de son poids économique et surtout de ses effets structurants sur l'espace. On les appelle les Fazenda, consacrées à une culture unique dédiée à l'exportation. La plage la plus sombre, celle qui indique les plus fortes variations positives (sur une échelle allant de -1 à +1, -1 signifiant la disparition totale, +1 l'apparition dans des régions jusque là dépourvues de bétail, avec tous les intermédiaires possibles), souligne très clairement l'arc du déboisement qui court du Maranhão à l'Acre et elle se situe même – ce qui est plus inquiétant encore – en avant de celui-ci, mordant sur l'État d'Amazonas, pour le moment peu affecté par les déboisements. B) Différents types d'agriculture En 1991, une réglementation européenne a été mise en place afin de limiter l'utilisation des produits phytosanitaires . La forêt amazonienne est menacée par le développement intensif de l'élevage au Brésil, selon un rapport publié le 29 janvier par l'organisation écologique Greenpeace, à l'occasion du Forum Social Mondial de Belém (Brésil). Le Brésil, c'est 15 fois la superficie de la France. Le roi du Portugal, fuyant Napoléon, se réfugie à Rio en 1808 et ouvre aussitôt les ports brésiliens au commerce extérieur. Ce type d’agriculture permet d’obtenir des rendements importants, notamment grâce à la mécanisation et à l’utilisation d’engrais et de pesticides. Il s'agit dans ce cas de l'arc du déboisement : le riz pluvial y est la première culture pratiquée, à la fois pour nourrir les défricheurs et pour nettoyer les parcelles, avant de les ensemencer en herbe destinée à l'alimentation des bovins. Mais leur développement même peut menacer l'équilibre de l'ensemble du système : trop miser sur les exportations pourrait compromettre la sécurité alimentaire, trop "rationaliser" transforme la libération de main d'œuvre en exode rural massif, ce qui aggrave les problèmes urbains. Ce type d'agriculture n'a qu'un seul avenir possible, la destruction des sols car plus on appauvrit la terre et plus on doit ajouter des produits destructeurs pour maintenir la productivité (au bout de quelques années, la terre ne peut plus suivre et augmenter les rendements). L'IBGE distingue sur cette carte les régions déjà modernisées, qui progressent vers le nord, de celles qui le sont moins, qui avancent elles aussi dans la même direction, sous forme d'une frontière pionnière, au détriment des zones à très basse densité, [1] Hervé Théry, directeur de recherche au CNRS-Credal, professeur invité à l'Universidade de São Paulo (USP), Chaire Pierre Monbeig, [2] Voir en corpus documentaire : Biocarburants, des filières en forte croissance), [3] Voir l'article de M. Guibert : Le Brésil acteur et stratège dans les négociations agricoles internationales. 3, 6) ? Clichés : Hervé Théry, Juruena (Mato Grosso), 2001 : assentamento* de réforme agraire où des migrants du Sud ont planté du café comme culture de rente *assentamento : voir l'article  Dynamiques foncières et agricoles au Brésil, Plan de café en grains, sud du Minas Gerais, 2007, Pointeur .kmz sur l'image Google Earth de Juruena ( 10°13'31.77"S / 58°32'58.18"O). Après 1984, une autre étape importante a consisté en la création de l’Institut Malheureusement, ces dernières se situent principalement en Amazonie, dans des régions mal dotées et mal desservies, si bien que les invasions illégales de terres continuent de plus belle, dans des régions plus attirantes. Cliché : Hervé Théry, Cliché Hervé Théry, Tamarana (Paraná), 2006 Le riz (arroz) et les haricots rouges (feijão) sont présents sur toutes les tables du pays, à tous les repas, le couple arroz-feijão étant l'équivalent brésilien de ce qu'était naguère en France notre "pain quotidien" : les haricots proviennent des deux grandes zones d'agriculture familiale du pays, dans le Sud et le Nordeste, plus récemment des environs de Bras'lia où ils sont plantés en culture irriguée, sous de gigantesques "pivots", des rampes d'arrosages de plusieurs centaines de mètres de diamètre. Les rampes ont un rayon de 400 ou 800 mètres, ce qui permet d'arroser 50 ou 200 hectares. La géographie agricole du Brésil en sort profondément changée ainsi que la place de l'agriculture dans le système économique. Les exportations ont été multipliées par six depuis l'an 2000. Vue générale de l'exploitation et fèves de soja à maturité. Ce monde pionnier du Nord-Ouest, comme avant lui le Far West des États-Unis, est aussi un monde de violence. Alors que la répartition des chevaux est très proche de celle des humains, tant la symbiose est encore forte dans le monde rural, celle des "petits animaux" présente deux types de répartition bien distincts. L’intensification écologique est comprise ici au sens large, c’est-à-dire au sein L'Argentine est cultivée sur plus ou moins 14 % de sa superficie, soit 380000 km² sur les 2800000 km² de son territoire, mais près de la moitié de la superficie du pays est occupée par de l'élevage extensif. Pointeur .kmz sur l'image Google Earth de São João d'Aliança (14°46'3.11"S / 47°22'36.90"O ). Le Brésil est un pays immense (8,5 millions de km2) dont on vante souvent l'impressionnante réussite agricole. 2 p. 254) 3. (docs. Grégoire a découvert l’agriculture syntropique au Brésil où il a étudié pendant deux ans. Ces exploitations agricoles consacrées à l'élevage bovin sont parmi les plus grandes de tout le pays, cette région, conquise dans les trente dernières années sur les savanes arborées des cerrados, a été organisée par et autour de la grande propriété. Développement, Ecole Nationale d’Agriculture de Meknès ; 3 CIRAD, UMR G-Eau . On ne s'en étonnera guère, car c'est dans ces régions, par ailleurs immenses et peu accessibles, que l'élevage s'est le plus développé dans les dernières années, ce qui n'a évidemment pas facilité le dénombrement des animaux. Le «boom» du soja au brésil : la constitution d'un «complexe national dependant» La culture du soja occupait autour de 200.000 hectares en 1960, et moins de deux millions d'hectares en 1970. Où se trouvent les terres disponibles, en réserve pour l'agriculture, sachant que les plus favorables en termes d'accessibilité et de qualité sont pour la plupart déjà exploitées. Lors de sa création, en 1943, il ne compte que 21 000 habitants. Selon les données récemment publiées par l'Institut brésilien de géographie et de statistiques (Instituto Brasileiro de Geografia e Estatística / IBGE : Censo Agropecuário 2006, Resultados preliminares) le Brésil comptait, en 2006, un peu moins de 170 millions de têtes de bétail, alors que selon la Pesquisa Pecuária Municipal, du même IBGE et à la même date, le pays en comptait alors près de 206 millions. L'arrivée au Brésil des premiers bovins importés d'Inde, vue par le peintre Calmon Barreto (Musée d'Araxa). Pointeur .kmz sur l'image Google Earth de Cristalina (17° 6'24.80"S / 47°36'6.82"O) On distingue aussi les retenues d'eau nécessaires à l'alimentation des rampes. En complément dans le pop-up : carte des variations du taux de masculinité 1980 - 1991 vs 1996 - 2000 Après quatre décennies de colonisation, l’Amazonie ‐ comme d’autres régions forestières en Afrique et Asie tropicales - s’intègre de plus en plus vite aux grands enjeux mondiaux (sociaux, économiques et environnementaux). • Au Brésil, l'arc de la déforestation de l'Amazonie s'étend du nord du Rondônia à l'embouchure de l'Amazone. Le Brésil est, depuis 2005, le premier exportateur mondial de viande bovine et se situe au 2e rang mondial pour le cheptel bovin (tonnage et/ou valeur), derrière l'Inde dont les vaches ont un tout autre statut et un tout autre rôle. Clichés : Hervé Théry, São João d'Aliança (Goiás), 2003. [5] Selon les dernières estimations de la FAO, sur 13,3 milliards d'ha de surfaces émergées de la Terre, 1,5 milliard est cultivé (cultures, plantations), 3,4 milliards sont consacrés à l'élevage (pâturages : prés, savanes), 3,9 milliards sont boisés ou forestiers et les 4,5 milliards restants sont les villes, les déserts, etc. En France, on se souvient des poulets brésiliens qui concurrençaient les poulets produits en  Bretagne. L'agriculture productiviste est un type d'agriculture qui vise l'augmentation des rendements en Une agriculture fortement intégrée à la mondialisation. Pages 68-69 du manuel 4. L'agriculture et l'élevage gardent donc une place importante dans l'économie brésilienne : générateurs de devises indispensables à l'équilibre des comptes nationaux, pourvoyeurs d'aliments bon marché et de main-d'œuvre avide de travailler, ils donnent aux autres secteurs les moyens de maintenir les salaires au plus bas. Forcément il y a de la place pour travailler la terre. Télécharger la fiche Brésil - Collection 2015 (PDF - 480 Ko) Contexte agricole et relations internationales. Résumé Au Brésil comme au Maroc, le secteur agricole est marqué par des différences extrêmes en termes de taille d’exploitation, ainsi que de niveau d’xéquipement, de capitalisation et de techniques. La lutte contre le Sida en Afrique du Sud, C'est comment ailleurs ? En rubrique "savoir faire" (P. Gautreau, S. Tabarly) : Identifier et analyser les marqueurs spatiaux des fronts pionniers brésiliens. La sécurité alimentaire du Brésil est-elle atteinte ? Le Brésil est-il aujourd'hui capable de nourrir l'ense En pop-up : indicateurs et méthodes pour une mise en évidence des dynamiques de fronts pionniers par l'analyse des variations spatiales et temporelles du taux de masculinité. Quels sont les différents types d’agricultures au Brésil ? Certes, tout le territoire n'est pas actuellement disponible pour l'agriculture, des aménagements coûteux seraient nécessaires pour l'ouvrir tout entier (à supposer que ce soit souhaitable), mais aucune partie du territoire brésilien n'est inutilisable pour l'agriculture [5]. Ce qu'il faut retenir. Les mesures contre la canicule en Allemagne et en Espagne, C'est comment ailleurs ? Dans trois des quatre cas, la production se partage entre deux régions principales, l'ancienne et la nouvelle. Des taxes sont tombées et les produits agricoles brésiliens en ont profité. C’est bien simple, ce pays est le premier producteur mondial de soja, de café, de sucre, de jus d'orange, de viande de bœuf, le deuxième producteur de maïs et le troisième producteur de volaille. Comment les Brésiliens ont-ils augmenté leurs productions agricoles ? Et puis, l'agriculture a été dérégulée pour devenir très libérale. De multiples changements sont donc à l'œuvre et ils transforment profondément le monde rural. 2 / Pourquoi peut-on parler de déserts verts au Brésil ? La Nélore a comme origine le bovin indien Ongole de type zébu que le Brésil a commencé à acheter en Inde dans les années 1920. Grégoire E. et Théry H. - "L'ogre et le petit Poucet". Pour les personnes initiées à l’agriculture syntropique, cette vision des choses ne va pas sans rappeler les principes évoqués par Ernst Gotsch, fondateur de ce type d’agriculture. Pour commencer, la libéralisation des échanges commerciaux entre le Brésil et le reste du monde. La répartition des bovins est totalement différente de celle des petits animaux : sa concentration majeure se situe dans le Mato Grosso, le Mato Grosso do Sul et le Goiás, avec des prolongements vers le Pará et le Tocantins. D'après un rapport de la FAO et de l'OCDE, le Brésil peut devenir rapidement le premier fournisseur de produits agricoles au monde, devant les Etats-Unis. Les exportations ont été multipliées par six depuis l'an 2000. Et le soja, naguère planté dans le Sud, vient désormais principalement du Mato Grosso où il progresse rapidement vers le nord. L'image en plus haute définition (471 Ko). Sans chercher la cause de cette différence – de méthodologie, très probablement – et en se rappelant que l'IBGE avertit que ces données provisoires "podem sofrer alterações quando da divulgação definitiva" ("peuvent être modifiées lors de leur divulgation définitive"), on se bornera à constater que plus de 26 millions de ces bovins fantômes se situent en Amazonie et dans le Centre-Ouest. Il est, depuis l'arrivée des Portugais, l'un des principaux moteurs de la dynamique des espaces ruraux brésiliens, des zones périurbaines à la pointe avancée des fronts pionniers. Depuis le début des années 90, la production agricole a plus que doublé et la production animale, elle, a triplé. On notera d'ailleurs que l'Inde a contribué au développement du cheptel bovin brésilien puisque, dans un discours à São Paulo, le 14 avril 2008, la présidente de la République indienne, Pratibha Patil, rappelait qu'environ 80% du bétail brésilien tire son origine d'une race de type zébu appelée Nellore (ou Nélore) originaire d'Inde [encadré ci-dessus] et que l'année 2006 avait marqué le 100e anniversaire de l'importation du premier spécimen au Brésil. Elle a aidé le Brésil à traverser la crise financière. indiquez quel type d’agri ulture est pratiquée. Ce monument rappelle le massacre de 19 paysans sans terre le 17 avril 1996. Le Brésil devient un géant vert et devient un grand exportateur de produits agricoles. D'après un texte d'Hervé Théry : "Des hommes, des femmes, des migrants", Cahiers des Amériques latines, n°24, Iheal, 1997 www.iheal.univ-paris3.fr/IMG/CAL/CAL24-dossier7.pdf, En rubrique Savoir faire : Identifier et analyser les marqueurs spatiaux des fronts pionniers brésiliens.