Plus de dix-huit mois après la mise en place de cette nouvelle procédure, force est toutefois de constater que le Parlement s’est encore relativement peu saisi de la technique des résolutions35. 42 Tels Michel Rocard avec vingt-huit utilisations entre 1988 et 1991 ; ou encore Édith Cresson avec huit utilisations en 1991-1992. Et elle a abouti à priver de navette nombre de textes, pour lesquels on chercherait en vain la nécessité de cette accélération ! L’intérêt de cette procédure a vite été compris par les gouvernements successifs de la Ve République, qui y ont eu recours de manière massive. 71 Ainsi, à l’Assemblée nationale, le temps de parole alloué à un député passe de cinq à deux minutes pour la discussion d’un article, comme pour la discussion d’un amendement (art. Face à ces critiques convergentes, la révision du 23 juillet 2008 essaie de lutter sur trois fronts : renforcer le domaine de la loi, lui redonner un caractère normatif plus affirmé et enfin rationaliser sa production. La citation la plus célèbre sur « Parlement » est : « Bonsoir Londres. 15Il revient également désormais à la loi de fixer les principes fondamentaux de la « recherche ». 31Régime atypique inclassable, la Ve République présente aujourd’hui les apparences d’un régime parlementaire, mais qui s’est fortement présidentialisé, depuis la révision constitutionnelle nº 62-1292 du 6 novembre 1962, confirmée et approfondie par la mise en œuvre du quinquennat présidentiel en 200057 et par l’« inversion du calendrier électoral » qui, depuis 2002, lie étroitement scrutin présidentiel et élections législatives. Il reconnaît des droits spécifiques aux groupes d’opposition de l’assemblée intéressée ainsi qu’aux groupes minoritaires. Il passe ainsi en revue nombre de dispositions relatives à l’ordre du jour des séances des assemblées, aux activités de législation, de contrôle et d’évaluation ou encore au Il préconisait également la reformulation de l’article 4 de la Constitution afin d’y écrire que la loi détermine les conditions dans lesquelles sont garantis les droits des partis et groupements qui ont ou n’ont pas déclaré soutenir le Gouvernement (proposition nº 60), ainsi que la rédaction d’une « Charte des droits de l’opposition » de caractère non normatif, mais de nature à garantir « les bonnes pratiques d’une démocratie parlementaire plus respectueuse des opinions et des personnes » (Une Ve République plus démocratique, p. 65 sq.). 44 Une Ve République plus démocratique, p. 34. Le caractère de catalogue d’objectifs (non normatifs, ou d’une normativité incertaine) qui caractérisait les lois de programme se retrouve désormais pour les lois de programmation qui s’appliquent à tous les domaines de l’action gouvernementale. nº 82-143 DC du 30 juillet 1982, « Blocage des prix »). Voir P.-Y. Or, la révision de 2008 n’affecte que de manière marginale ces ordonnances. 5 On peut ici penser aux révisions nº 92-554 du 25 juin 1992 introduisant un droit de regard parlementaire sur la production des normes européennes, à la loi constitutionnelle nº 95-880 du 4 août 1995 portant extension du champ d’application du référendum, instituant une session parlementaire ordinaire unique, ou encore à la loi constitutionnelle nº 96-138 du 22 février 1996 instituant les lois de financement de la Sécurité sociale. Déposés parfois à la hâte, et fréquemment trop peu de temps avant leur examen, de nombreux projets de lois ne permettent pas aux rapporteurs des commissions saisies au fond de travailler de manière approfondie et rigoureuse. Ceux-ci résident tout à la fois dans le caractère factice de plusieurs innovations et dans la possibilité toujours reconnue au Gouvernement de mobiliser différents outils constitutionnels qui restent à sa disposition. La Déclaration universelle des Droits de l’homme, 60 ans après, Pouvoirs exceptionnels et droits fondamentaux. Les modifications des règlements des deux assemblées démontrent que les droits et garanties concrètes reconnus aux groupes minoritaires et d’opposition ont été extrêmement limités. Comme l’indique justement Xavier Vandendriessche, il était possible de retenir une conception très large du domaine « économique et social » sur lequel portaient ces lois de programme, et donc « admettre sans peine que toute politique publique peut se rattacher à la vie économique et sociale »31. 16Au-delà de cette extension limitée du domaine législatif, la révision constitutionnelle de 2008 cherche à améliorer la qualité de la loi en renforçant son caractère normatif. Jean-Manuel Larralde, « La réforme de 2008, une réelle revalorisation du rôle du Parlement ? On peut surtout penser que la portée des différentes réformes risque de se diluer progressivement, en raison de pratiques gouvernementales contraires à l’esprit de la réforme. F. Fillon a également rappelé aux ministres de participer de manière active aux travaux en commission, afin de faire utilement valoir le point de vue du Gouvernement sur le texte défendu (Circulaire du 15 avril 2009 relative à la mise en œuvre de la révision constitutionnelle, JORF, nº 0089, 16 avril 2009, p. 6546). Les chiffres n’ont pas ralenti depuis, puisque de 2005 à 2010, cent quatre-vingt-huit ordonnances ont été publiées, soit plus que le nombre total d’ordonnances publiées sur vingt ans de 1984 à 200360. This reform gives the Parliament new prerogatives to control the Government and enhances its legislative powers. Il propose ainsi Certains commentateurs n’ont pas manqué de critiquer cette limitation, en soulignant que l’article 49 alinéa 3 de la Constitution constitue « un élément essentiel pour la stabilité de la Ve République » et que sa limitation serait notamment de nature à rendre la situation d’un Gouvernement minoritaire intenable21. Est également porté à un jour de séance par mois l’ordre du jour réservé à l’initiative des groupes parlementaires minoritaires et d’opposition. La Ve République marque la fin de la puissance parlementaire ramenée à de plus justes proportions. G, nº 31, 30 juillet 2008, I, 174, § 26. 4Le Parlement, qui incarne normalement le pouvoir législatif, s’est vu dès 1958 limité dans cette fonction, puis progressivement dépossédé par la montée en puissance du pouvoir exécutif. Le Working Paper 61 a été publié à l’issue de cette étude. Destiné dans l’esprit du constituant à être utilisé avec parcimonie, pour des textes particulièrement importants pour la réalisation du programme du Gouvernement, il a été progressivement détourné de son usage premier, pour devenir une arme de contrainte contre une Assemblée nationale montrant des velléités d’indépendance vis-à-vis du Gouvernement20 : utilisé quatre-vingt-deux fois depuis 1958 (une motion de censure ayant été déposée en réponse à son application à quarante huit reprises), il a permis l’adoption de quarante-huit textes (aucune utilisation au cours de l’actuelle législature, seulement trois sous la précédente). Elle renvoie également à la volonté de restaurer la norme législative. 3 de la Constitution). 41 O. Dord, « Vers un rééquilibrage des pouvoirs publics en faveur du Parlement », Revue française de droit constitutionnel, nº 77, 2009, p. 101-102. Les titulaires particuliers des droits fondamentaux, Portail de ressources électroniques en sciences humaines et sociales, A. Redonner au Parlement la maîtrise de la fabrication de la loi, B. Lutter contre la perte de substance de la loi, II. Sécurité juridique et complexité du droit, Paris, La documentation française (Études et documents du Conseil d’État), 2006). Or, ce problème n’en est pas vraiment un, car, hormis le recours à des sessions extraordinaires (deux chaque année depuis 2007), l’article 48 pourra facilement être détourné dans la pratique. L’idée est ici d’envisager a priori les objectifs des effets de la loi et de s’assurer que toutes les conséquences de ce texte, qu’elles soient juridiques, économiques, sociales ou budgétaires ont bien été prises en compte37. Cette possibilité a d’ailleurs vite été comprise et mise en œuvre et elle a ainsi été utilisée au Sénat en mai 2009 pour l’adoption de la loi nº 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires et en septembre 2009 pour l’adoption du projet de loi HADOPI (loi nº 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet). Parlement ) , cet effacement est renforcé par la pression exercée par le gouvernement sur le Palement en matièe d’élaboation de la loi et ce , gâce à l’impo tance et la divesité des péogatives accodées au pemie ainsi u’à la pésence du fait majoitai e , depuis 1962 , qui 53 Voire le chantage : on sait ainsi que Christine Albanel, alors ministre de la Culture, avait menacé de présenter sa démission si le projet de loi « Internet et création » (loi HADOPI) n’était pas adopté au printemps 2009 (l’Assemblée nationale avait alors rejeté la version du texte issue de la commission mixte paritaire) (http://www.lexpress.fr/actualite/politique/albanel-partira-si-la-loi-hadopi-n-est-pas-votee_753344.html). Le vote sera donc différé au mardi, après les questions au Gouvernement. 52 Voir S. Huet, « 2009, l’année du nouveau Parlement », Le Figaro, 22 décembre 2009. Ce nouvel article 48 pourrait poser des difficultés concrètes à des gouvernements atteints de « frénésie législative » et qui n’auraient déjà pas le temps de faire adopter tous leurs projets. 27Cette dérive semble bien avoir été prise en compte par le constituant de 2008 puisque l’on ne trouve plus trace de l’« urgence » dans la Constitution. 44 al. 12 Projet de loi constitutionnelle…, p. 6. […] la déclaration d’urgence ou, depuis mars 2009, à la procédure accélérée […] tend à devenir la norme pour la plupart des projets de loi, et même pour des propositions de loi, dans le cadre des nouvelles dispositions régissant l’ordre du jour instaurées par la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008. 23 Cet argument ayant déjà été mis en avant par le comité Balladur, qui soutenait que « pour améliorer le travail en séance publique, il convient de lui donner un caractère plus politique que technique, ce qui implique que la discussion s’engage non plus sur le texte du Gouvernement mais sur celui de la commission. Voir également « Secret-défense : les députés trouvent un compromis », 9 juin 2009 (http://tempsreel.nouvelobs.com/politique/20090609.OBS9837/les-deputes-parviennent-a-un-compromis-sur-le-secret-defense.html). Ainsi, dans la proposition de loi constitutionnelle nº 386 tendant à réviser la Constitution du 4 octobre 1958 afin de rééquilibrer les institutions en renforçant les pouvoirs du Parlement, présentée par J.-P. Bel et des membres du groupe socialiste et apparentés du 12 juillet 2007, ces sénateurs souhaitaient « desserrer le carcan du contrôle gouvernemental sur le travail parlementaire en supprimant l’article 49, alinéa 3 ainsi que le vote bloqué, en limitant le nombre de déclarations d’urgence à 10 par an, en restreignant le domaine des ordonnances ». Premier temps, en conférence des présidents, le “patron” du groupe UMP, Jean-François Copé, demande un scrutin solennel sur chacun des textes. 28Enfin, même la réforme pourtant présentée comme la plus intéressante, et qui impose que l’examen des projets de loi porte sur la version de la commission, risque de générer des effets pervers, en renforçant encore un peu plus les liens entre l’exécutif et sa majorité parlementaire. Dans sa décision nº 2004-500 DC du 29 juillet 2004 (loi organique relative à l’autonomie financière des collectivités territoriales), il a ainsi rappelé qu’il résulte de l’article 6 de la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen de 1789 que « la loi a pour vocation d’énoncer des règles et doit par suite être revêtue d’une portée normative » (cons. Il est certes louable que la discussion en séance ne débute pas avant l’expiration d’un délai de six semaines suivant le dépôt du texte et que la seconde assemblée ne débute pas l’examen du texte moins de quatre semaines après sa transmission. De même, le ministre de la Défense, Hervé Morin, a été malmené par l’Assemblée nationale début juin 2009, lorsque le président de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann, a émis un avis défavorable sur les nouvelles dispositions régissant le secret défense (il s’opposait à la création de « lieux classifiés »). 2 et 100 RAN). 6 bis al. 44 al. 13), le contrôle des politiques publiques (art. En 2001, cet auteur faisait d’ailleurs déjà de la modification de l’article 20 de la Constitution « la condition sine qua non pour réaffirmer la nature parlementaire de nos institutions et rendre au Parlement la capacité d’initiative qu’il a globalement perdue en 1958 » (« Le Parlement entre déclin et modernité », Pouvoirs, nº 99, 2001/4, p. 62, http://www.cairn.info/revue-pouvoirs-2001-4-page-59.htm). Dans le chapitre « Gouvernement et Parlement » : [] Les constituants ont voulu assurer la stabilité gouvernementale, tout en faisant du chef de l'exécutif l'émanation de l'Assemblée. Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 36462), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 36446), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 36442), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 36009), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 35846), Lettre au roi de Prusse, 27 novembre 1777, Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 35806), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 35803), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 35625), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 35624), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 35443), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 35408), Citation de Jean le Rond d'Alembert (n� 35303), Les proverbes, leurs origines et explications, D�finitions de l'adage, l'aphorisme, la citation, le dicton, la maxime, le proverbe et la sentence. C’est dans ce contexte institutionnel, politique et juridique très particulier que s’insère la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Le droit français à la lumière du droit administratif comparé, Le corps humain saisi par le droit : entre liberté et propriété, Conseil constitutionnel et droits fondamentaux, L’universalisme des droits en question(s). La logique de la révision est assez simple et renvoie au « mouvement nécessaire des choses » cher à Montesquieu7 : puisque le Parlement de la Ve République est trop faible, et le pouvoir exécutif trop puissant, il convient d’encadrer et de mieux contrôler le pouvoir exécutif et, corrélativement, de renforcer profondément le Parlement8. Avant la révision de 2008, s’agissant des projets de loi, la discussion en séance publique portait, devant la première assemblée saisie, sur le texte présenté par le Gouvernement (art. En effet, le Gouvernement ne dispose plus (hors loi de finances initiale et loi de financement de la sécurité sociale) que de deux semaines sur quatre dans chaque assemblée pour faire voter ses textes, sauf durant les sessions extraordinaires où le Gouvernement conserve la maîtrise de la totalité de l’ordre du jour50. En République Fédérale d’Allemagne, les présidences des 22 commissions du Bundestag et celles des commissions d’enquête sont réparties à la proportionnelle des groupes, la commission des finances est présidée par un membre du principal parti d’opposition » (Une Ve République plus démocratique, p. 66). 95 al. La Ve République marque la fin de la puissance parlementaire ramenée à de plus justes proportions. La restauration du pouvoir exécutif s’est accompagnée d’une limitation du pouvoir législatif, tant en ce qui concerne ses missions normatives que celles de contrôle. Page 1/1 Citations parlement. 34 de la Constitution). Ces quelques dispositions sont, en outre, très en retrait par rapport à ce qu’avait pu envisager le comité Balladur69 et même par rapport à la version initiale du projet de loi constitutionnelle70.